Steve Chainel : « Dans la tête je suis resté bloqué à 18, 19 ans »
Enfin ! Steve Chainel (Chazal – Canyon) en aura rêver pendant plus d’une décennie de ce maillot de Champion de France de cyclo-cross. L’ancien professionnel avait préféré abandonner sa carrière route en 2015 pour monter sa propre équipe en cyclo-cross (Cross Team by G4 devenu Chazal – Canyon) où il ne fait pas qu’être leader mais où il entraine aussi les jeunes. Une dévotion totale pour sa passion qui finit par payer. À l’arrivée, l’émotion était énorme pour celui qui est séparé depuis peu de sa femme, Lucie Chainel, qui évoluait dans la même équipe et qui vient de mettre un terme à sa carrière. Chainel est aussi devenu consultant TV pour Eurosport France et a dû jumeler entre les épreuves qu’il couvrait sur place, dont le Tour de France, et son entraînement. Sa victoire aujourd’hui est celle de la passion et de la persévérance. Après la course il a été interrogé par la TV. Voici son interview.
Steve, quelle est l’émotion ?
Ça fait 13 ans que je cours après. J’ai eu neuf chances quand j’étais chez les professionnels. Tous les managers m’ont laissé faire comme j’avais envie et aujourd’hui je les en remercie. Je suis redescendu amateur il y a trois ans. J’ai créé mon équipe. Les minots hier étaient déçus de ne pas être sur le podium. Tout le monde connaît ma situation. Lucie a décidé d’arrêter la saison… on se sépare. J’ai vécu une grande histoire avec elle mais voilà c’est des histoires. Aujourd’hui il y avait donc beaucoup d’émotions. Ce maillot j’en ai rêvé pendant x années. J’ai fait le Tour cette année avec mes collègues d’Eurosport et je leur disais qu’il n’y avait qu’un seul maillot qui comptait, c’était le maillot bleu-blanc-rouge et aujourd’hui je vais courir un an avec, c’est… c’était un rêve et ça devient réalité. C’est exceptionnel !
Après l’arrivée il y a eu l’accolade de Francis Mourey (deuxième).
Avec Francis on s’est battu ces douze, treize dernières années. Il a toujours été au dessus de moi et c’est un grand monsieur, un grand bonhomme comme on dit, avec lequel j’ai énormément de respect. Il a été neuf fois Champion de France. Je l’ai idolâtré pendant presque 10 ans pendant qu’il me battait. J’avais toujours un complexe d’infériorité. Maintenant, cette année je suis dans une bonne dynamique et c’est génial.
Il a fallu du culot pour attaquer d’aussi loin.
J’ai vu que j’avais de très bonnes sensations. Clément Venturini n’était pas dans un très grand jour. Techniquement je me sentais très fort. Quand je suis parti tout seul j’ai en plus crevé de la roue avant. Je n’ai pas voulu paniquer, je n’ai pas crié à mon staff que j’avais crevé. Je ne voulais pas créer un complexe d’infériorité ou quelque chose qui puisse les faire revenir. J’étais très confiant. Le public a été exceptionnel. Déjà à l’échauffement : « Allez Steve ! Allez les Rois de la Pédale (émission d’Eurosport, ndlr), machin et tout…« . Je n’avais pas vraiment le droit de me louper. Et moi qui n’ai jamais su résister à la pression, aujourd’hui j’ai résisté. Il me tarde d’aller mettre ce maillot bleu-blanc-rouge.
Maintenant ce maillot est à vous pour un an.
Oui. C’est exceptionnel, je suis très content. J’ai 34 ans mais dans la tête je suis resté bloqué à 18, 19 ans. Moi je suis avec les jeunes Espoirs avec lesquels je partage mon expérience. L’équipe je la construis évidemment pour eux parce que j’ai très envie qu’un jour ils puissent monter sur ce même podium et sur un podium international. C’est une très belle discipline le cyclo-cross. Quand on voit le monde qu’il y a en public, le monde qui s’intéresse… je me dis que merde, ce serait vraiment bien qu’un jour il y ait un Français qui soit Champion du Monde. Ça aurait pu être Clément Venturini. Il a choisi d’aller sur la route. Tant mieux pour lui. J’espère qu’il va nous faire de grandes choses sur la route aussi mais maintenant il faut que les jeunes aient un avenir en cyclo-cross.