Les vieux démons de Fabio Aru re-surgiraient-ils ?
L’arrivée de Rodez n’était pas supposée faire de différences au classement général, elle en a finalement fait presque autant que la très difficile étape de Peyragudes. Christopher Froome (Team Sky) reprend le maillot jaune à Fabio Aru (Astana) plus un coussin de sécurité de 19 secondes ! Ce n’est pas extraordinaire mais c’est quand même un sacré retournement de situation, complètement inattendu. Pourtant hier Aru assurait que pour l’étape d’aujourd’hui il avait l’équipe qu’il fallait. Alors que s’est-il passé ?
En effet si l’équipe Astana a perdu ses deux meilleurs soutiens pour Fabio Aru, avec Dario Cataldo et Jakob Fuglsang, ces deux pièces maitresses étaient des grimpeurs. Or aujourd’hui c’était avant tout une course de positionnement. Avec Grivko, Gruzdev, Kozhatayev, Zeits, Valgren (même si ce dernier blessé était l’un des premiers distancés) et aussi un bon rouleur comme Lutsenko, le Sarde pouvait s’appuyer sur de solides soutiens pour le positionnement. Ils ont pourtant failli.
A l’arrivée, Aru se contentera de cette déclaration : « Au pied de la côte j’étais trop loin derrière. Un trou s’est formé au kilomètre et j’ai dû faire trop d’efforts pour boucher le trou. Ce sont des situations de course, la chose importante est de continuer sur la bonne voie. J’aurai préféré conserver le maillot jaune mais il reste une troisième semaine très difficile. Tout n’est pas perdu ! »
A vrai dire les problèmes de positionnement ont commencé avant même le final musclé. Dans la Côte de Centrès, dont le sommet était à un peu plus de 35km de l’arrivée, alors que le peloton est aussi sous la pression d’un vent de côté, Aru semble déjà loin. Valgren pourtant déjà distancé à ce moment de la course déclarera d’ailleurs après l’arrivée à bt.dk : « Nous nous sommes perdus quatre ou cinq fois (Aru et ses équipiers, ndlr). Je ne sais pas si c’est sa faute ou la notre ». Rappelons quand même que si Aru a remporté La Vuelta, il n’y avait porté le maillot rouge que cinq jours avant de le perdre et de ne le récupérer qu’à la veille de l’arrivée finale. Sur le Giro il ne l’a porté que lors d’un contre-la-montre. Le leader italien manque sans doute un peu d’expérience en la matière.
Mais une autre ombre pourrait surgir sur Aru. Rappelons aussi que le coureur italien n’a jamais fait un grand Tour sans avoir une période de moins bien, plus ou moins conséquente. Au Giro 2014 il se révélait surtout en troisième semaine et n’a jamais été dans la lutte pour la victoire finale, même s’il terminait troisième. Au Giro 2015, il a connu une défaillance dans l’étape d’Aprica, lors du passage du Mortirolo. Même s’il conservait la troisième place du général, il avait avoué par la suite être proche de l’abandon. Ce n’est que grâce à la présence de Landa dans son équipe qui pouvait marquer Contador et qui a ensuite roulé pour Aru dans l’étape de Sestriere que l’Italien a pu se refaire et prendre la deuxième place finale. Sur sa Vuelta victorieuse la même année, il n’a pas connu de réelle défaillance mais a eu des hauts et des bas. Il va finalement chercher la victoire sur une superbe dernière étape de montagne, la veille de l’arrivée, où il piège Tom Dumoulin, qui avouera par la suite être en bout de course, malade. Enfin l’an dernier sur le Tour de France, il était sixième du général avant de s’écrouler dans la dernière étape avant Paris, arrivant à Morzine.
Aru connaitrait-il une période de moins bien ? Difficile à dire. Même Froome ne savait pas que le maillot jaune était distancé avant que son coéquipier Kwiatkowski ne lui dise dans l’oreillette. En tout cas si tel est le cas, son équipe a clairement démontré qu’elle était incapable de l’épauler. Sous cet aspect la perte du maillot jaune pourrait d’ailleurs être une bonne chose, si elle ne s’accompagnait pas d’un débours de 19 secondes.