Christopher Froome : « Le Tour le plus serré »
Si le suspens pour le podium a été très intense, celui pour la victoire finale ne l’a pas été. Christopher Froome (Team Sky), bien meilleur spécialiste du chrono que ses deux poursuivants n’a pas eu de mal à conserver son maillot jaune malgré un faible avantage au départ. Comme on s’y attendait, il l’a même augmenté significativement. Si bien qu’à la fin de ce Tour, les écarts sont plus conformes à des écarts de Grand Tour et feront peut-être oublier à quel point ce Tour aura été indécis jusqu’à la fin ou presque. Paradoxalement, alors que ce Tour ne comportait que 36,5km de chrono, ce seront sans doute eux qui auront le plus façonné le général. En effet Froome s’impose pour 54 secondes sur Rigoberto Uran (Cannondale – Drapac) qui avait perdu 41 secondes à Dusseldorf et 24 secondes aujourd’hui… Cela dit, on ne peut pas réellement dire que Froome, bien qu’il ait perdu le maillot sur l’étape de Peyragudes, ait été réellement en danger sur ce Tour.
Chris, quel est le sentiment de ne plus être qu’à un Tour du record des cinq victoires ?
C’est un grand honneur. Juste que mon nom soit mentionné dans une phrase parlant d’un tel record… D’abord je vais aller à Paris. Je préfère prendre une saison à la fois. Ce qui est sûr c’est que cette victoire m’a donné une nouvelle appréciation d’à quel point il est dur de gagner cinq Tours. Chaque année ce devient plus dur.
C’était donc le Tour le plus difficile à gagner de votre carrière ?
Difficile de dire si c’était le plus dur. C’était certainement le plus serré. Mais chaque Tour de France est dur et comme je l’ai dit je réalise encore plus maintenant à quel point il est difficile d’enchaîner les victoires sur le Tour de France. Mais le plus dur ? Je ne dirai pas ça. Je dirai juste le plus serré.
Dans vos quatre succès, lequel compte le plus ?
Je ne sais pas, je ne suis pas du genre à regarder derrière. La première fois il y’avait la nouveauté de devenir un vainqueur du Tour. Puis après il y avait un nouveau challenge : celui de rééditer la chose. La première fois ça n’a pas marché puis après finalement j’ai eu ma deuxième victoire et puis il y a eu un nouveau défi : celui d’avoir une troisième victoire mais consécutive à la deuxième… Mais jamais je n’ai rêvé remporter quatre titres dont trois consécutifs. Être proche de Merckx, Anquetil, Indurain… C’est un énorme privilège.
Ce matin, vous pensiez que c’était encore possible de perdre ce Tour ?
Il est certain que ma première place n’a jamais été sécurisée. Elle ne l’était pas ce matin au départ. Hier je voulais gagner cette étape. Ce matin j’étais juste content d’avoir de bonnes jambes et de ne pas être dans un mauvais jour.
Vous n’êtes pas déçu de gagner sans avoir remporté d’étape ?
Non pas du tout ! On savait dès le départ que ce serait serré, c’était le parcours qui voulait ça. La tactique n’était pas de placer une attaque qui permettrait de distancer les adversaires car le parcours ne le permettait pas vraiment. L’objectif c’était de durer sur les trois semaines. Car c’était un vrai Grand Tour de trois semaines. Il ne fallait pas avoir une seule mauvaise journée. J’ai souffert dans les Pyrénées, j’ai perdu du temps et le maillot. Mais l’important était de durer. Il y a eu des hauts, il y a eu des bas mais on n’a bien vu que le résultat au général ne dépendait pas du résultat d’une étape. C’était une course nerveuse, sans doute moins aggressive que par le passé. Et finalement les chronos ont beaucoup joué.
Ce jour là dans les Pyrénées à Peyragudes, vous saviez que ce serait difficile ?
Oui je le savais. Je n’avais pas les meilleures sensations. Je me suis assurément mis dans le rouge. Il n’y avait juste plus d’essence dans le réservoir.
Vous n’avez pas été trop heurté par les huées du public dans le Stade Vélodrome ?
Non je pense que c’est normal. Je partais derrière Bardet qui était le meilleur Français, nous sommes à Marseille, dans un stade de foot… Je ne le prends pas personnellement. C’est déjà oublié. Globalement je trouve que l’accueil du public a été incroyable cette année. Le meilleur jusqu’à présent. Je remercie tous les fans, ce sont eux qui font cette course si spéciale.
On parlait plus tôt des coureurs ayant remporté cinq Tours de France. Parmi eux y en a-t-il un auquel vous vous identifiez plus qu’aux autres ?
Non. J’ai un immense respect pour eux mais je ne suis pas le genre de personne qui a un modèle. Je pense que vous reconnaitrez tous que j’ai un style bien unique sur le vélo (rires…), avec mes bras écartés… Je suis du genre à me mettre un objectif personnel et à tout faire pour l’atteindre. Il y a aussi le fait que je suis arrivé tard dans le vélo. Je pense à ma jeunesse en Afrique. Je n’ai entendu parler du Tour que lorsque Armstrong gagnait et qu’il y avait Ivan Basso. Je n’ai pas vu les Hinault, Merckx, Anquetil ou Indurain à la TV quand je me suis mis au vélo. Je ne connais pas bien toute l’histoire du cyclisme.
Demain vous allez tenter de faire gagner à Mikel Landa une seconde pour le mettre sur le podium ?
On va voir avec l’équipe mais je ne pense vraiment pas que ce soit au programme. Pour moi la course pour le général est finie ce soir.