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Le mystère Simon Spilak

Les ordinateurs ont, il est vrai, depuis bien longtemps suppléé les stylos à plume en salle de presse. Mais dans une autre époque, peu d’encre aurait quoiqu’il en soit été déversée lors des conférences de Simon Spilak. Le Slovène de 30 ans, victorieux du Tour de Suisse pour la deuxième fois de sa carrière dimanche, n’est pas un grand loquace. Aussi efficace sur son vélo qu’emprunt de laconisme une fois descendu de sa monture, Spilak n’est un individu facilement dissécable. Sans nul doute atteint par ce symptôme largement répandu qu’est la glossophobie, soit la crainte de s’exprimer en public, le coureur de la Katusha-Alpecin est un mystère à plusieurs niveaux qu’il est ainsi difficile d’éclaircir tant l’échange est prompt, peu étoffé. Ses quatre années dans la structure Lampre lui ont davantage permis de garnir son palmarès que de maîtriser complètement la langue transalpine. C’est néanmoins par cet intermédiaire qu’il s’exprime au sein de son équipe ou auprès des médias, à défaut de l’anglais qu’il n’a jamais appris.

C’est ainsi avec un sourire rare mais marqué qu’il a, hier soir, formulé quelques phrases en italien, toutes ayant pour dénominateurs communs la simplicité et la brièveté. « C’était une journée très difficile, a-t-il dit après sa cinquième place dans le contre-la-montre final. Il faisait un peu chaud pour moi mais je suis très heureux d’avoir gagné le général aujourd’hui. » Un succès en grande partie construit sur les pentes du glacier de Sölden, vendredi, où, suite au travail monstrueux de son acolyte Rein Taaramae, il fut en mesure de repousser loin tous ses rivaux à la victoire finale. Quant à la journée la plus dure ? « Jeudi, avec l’Albulapass ». Et la journée la plus belle ? « Aujourd’hui, car j’ai gagné, j’ai la première place. » Des remerciements ? « Cette victoire est très importante pour moi et l’équipe, qui a d’ailleurs très bien travaillé et j’inclus le staff. » La suite ? « Je vais prendre une semaine de repos puis ma prochaine course sera le Tour de Pologne où j’espère faire aussi bien qu’ici ».

La conférence de presse aurait pu s’arrêter là, mais on n’en aurait pas su bien davantage sur le garçon. Un trentenaire, déjà, dont le palmarès est pourtant bien fourni. Arrivé dans l’élite en 2008 chez Lampre, après trois saisons chez Adria Mobil, Simon Spilak n’était déjà pas passé inaperçu dans les rangs juniors et espoirs, s’illustrant sur quelques unes des plus prestigieuses épreuves réservées aux jeunes. Mais c’est en 2010 qu’il éclôt sur la scène internationale avec une victoire au général du Tour de Romandie acquise sur tapis vert. Profitant de la disqualification d’Alejandro Valverde, le Slovène empoche le général en plus de la quatrième étape remportée à la pédale. Il s’agit de son premier fait d’armes, et bien d’autres suivront, notamment sur le territoire helvétique sur lequel il semble particulièrement à l’aise.

Trois fois deuxième de ce même Tour de Romandie (2013, 2014, 2015), où il enlève aussi deux étapes, Simon Spilak enchaîne les performances sur les courses WorldTour d’une semaine (3e et 4e de Paris-Nice, deux fois 4e du Tour du Pays Basque) tout en levant les bras sur le Critérium du Dauphiné ou le Grand Prix de Francfort. Il lui faut toutefois attendre 2015 pour décrocher un nouveau succès final dans une grande course par étapes, sur la route cette fois-ci. Il enlève le Tour de Suisse devant Geraint Thomas et Tom Dumoulin mais ne peut réellement défendre son titre en 2016 lors d’une saison moins aboutie qu’à son habitude. C’était sans doute pour mieux rebondir encore, la semaine passée, et reconquérir le trône helvétique. Pourtant, un trait retient l’attention à la lecture de son pedigree. Ironiquement, c’en est un qui n’y figure pas, d’où le questionnement. En dix ans dans l’élite, Simon Spilak n’a jamais brillé sur un Grand Tour, malgré ses excellentes aptitudes sur des épreuves montagneuses d’une semaine. Il n’a d’ailleurs pris le départ que de cinq Grands Tours (ndlr : 3 Tours de France, 2 Tours d’Italie) au cours de sa carrière, pour deux abandons et des passages complètement anonymes.

S’il tient tête aux meilleurs spécialistes de ces épreuves sur une semaine, il n’a jamais montré qu’il en était capable sur trois. « Je préfère simplement les courses de 7-10 jours », a-t-il tranché sans argumenter en conférence de presse. En interne, il se dit que le Slovène a d’ores et déjà fait une croix sur les Grands Tours. Un membre de la Katusha-Alpecin nous indiquait ainsi que Spilak n’appréciait guère ces évènements. Et pourtant, son « rêve » demeure de « remporter une étape du Tour de France ». Pour cela, il faudra inévitablement y retourner, passer la première semaine généralement réservée aux routiers-sprinteurs, et attendre l’arrivée des massifs. Selon la même source, ce long délai avant la montagne est justement à l’origine de la frustration du coureur, qui ne semble pas attiré par l’idée de prendre son mal en patience pendant dix jours pour voir une première opportunité se présenter. « Chaque année, j’essaie de travailler en vue des Grands Tours. Peut-être que l’année prochaine je ferai une course de trois semaines », a-t-il conclu sans trop y croire. Chez Katusha-Alpecin, on n’y croit même plus du tout…

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