Milan-Sanremo : Le numéro magistral de Vincenzo Nibali
Vincenzo Nibali rêvait plus que tout d’accrocher Milan-Sanremo à son palmarès. Mais bien souvent contrarié par le parcours, il n’y était encore jamais parvenu. Le temps et la détermination ont finalement fait leur oeuvre. Ce samedi, le Requin de Messine a accroché son deuxième Monument après ses deux Tours de Lombardie, au terme d’un splendide numéro dans le final de La Primavera. Le coureur de la Bahrain-Merida a démarré dans le Poggio, a compté jusqu’à douze secondes d’avance, et a finalement réussi à tenir en respect le peloton jusque dans la dernière ligne droite ! Caleb Ewan (Mitchelton-Scott) a fait jouer sa pointe de vitesse pour prendre la deuxième place devant Arnaud Démare (Groupama-FDJ). Vincenzo Nibali devient le premier Italien à remporter Milan-Sanremo depuis Filippo Pozzato en 2006 et complète encore un peu plus son sublime palmarès.
Une échappée ne tarde pas à se détacher dans cette édition 2018 de Milan-Sanremo, lancée sous de grosses averses. Mirco Maestri, Lorenzo Rota (Bardiani-CSF), Evgueny Kobernyak (Gazprom-Rusvelo), Guy Sagiv, Dennis Van Winden (Israel Cycling Academy), Sho Hatsuyama (Nippo-Vini Fantini-Europa Ovini), Charles Planet (Novo Nordisk), Matteo Bono (UAE Team Emirates) et Jacopo Mosca (Wilier Triestina-Selle Italia) n’ont pas à grandement insister pour sortir devant le peloton. Après cinq bornes seulement, la différence est faite et les attaquants du jour peuvent prendre le large. Progressivement, leur avantage augmente pour atteindre les cinq minutes après quarante bornes et une heure de course. En tête de peloton, ce sont les équipes Bora-hansgrohe et Sky qui assurent un tempo relativement modéré, avec Juraj Sagan et Luke Rowe aux commandes. Les kilomètres défilent, les minutes passent, Quick Step Floors vient se joindre à la chasse, et mais la situation reste plutôt stable. C’est ainsi que les fuyards atteignent le sommet du Passo del Turchino, avant de redescendre sur la côte ligure, avec un solide avantage de six minutes. Derrière, toutefois, le peloton embraye malgré une chute qui force notamment Lukasz Wisniowski (Team Sky) à l’abandon. À la suite d’une grosse descente dans le paquet, l’écart passe ainsi de six à deux minutes en l’espace de quinze kilomètres !
Mais à 130 bornes du but, le peloton comprend bien qu’il revient trop vite et lève donc naturellement le pied. Les neuf fuyards reprennent le large et entament les cent derniers kilomètres avec quatre minutes d’avance. Quelques minutes plus tard, les hommes de tête franchissent le cap des 200 kilomètres d’échappée, alors que Juraj Sagan et Luke Rowe sont eux aussi toujours à la mène derrière, en compagnie de Tim Declercq. La situation se stabilise pendant plusieurs dizaines de kilomètres, mais à l’approche des Capi, le peloton hausse quelque peu le tempo. Au pied du Capo Mele, à 53 kilomètres du but, l’échappée ne compte plus que deux petites minutes d’avance. Dans la foulée, le Capo Cervo est arpenté puis se présente le Capo Berta à quarante kilomètres de la ligne. C’est ici que l’échappée explose alors que le peloton se montre de plus en plus menaçant. Maestri et Rota (Bardiani-CSF) n’emmènent que Van Winden (Israel Cycling Academy) et Bono (UAE Team Emirates) avec eux pour résister un peu plus à la meute.Ils franchissent d’ailleurs le dernier Capo avec quelques secondes d’avance sur le paquet. Leur aventure dure cinq minutes supplémentaires, mais la bagarre de positions avant la Cipressa dans le peloton leur est fatale. C’est donc en première position que le paquet entame l’avant-dernière difficulté du jour, après avoir réintégré tous les courageux.
La Groupama-FDJ entame la bosse en tête pour Arnaud Démare et se contente d’imprimer un train tout juste solide. Cela dure pendant près de la moitié de l’ascension, et pourtant, aucune attaque ne survient. C’est alors que la Team Sky décide d’augmenter l’allure. L’écurie britannique mène donc jusqu’au sommet mais la course reste orpheline d’offensives. L’essentiel des coureurs parvient donc à rester au contact et c’est même la Groupama-FDJ qui retrouve les premières positions juste avant la descente. Les hommes de Marc Madiot portent Arnaud Démare en tête et lui permettent de ne prendre aucun risque. De retour sur le plat, la formation française continue son travail avec quatre hommes pour le Picard, mais de nombreuses équipes commencent alors à remonter en vue du Poggio. La tension s’accentue, ça frotte énormément et alors que les rênes du peloton changent de mains à chaque seconde, une chute finit par se produire. Mark Cavendish heurte un terre-plein central et fait un soleil avant de retomber lourdement. Il coupe ainsi la route de nombreux coureurs sur la droite de la chaussée, quelques hectomètres seulement avant les 3,7 kilomètres à 3,7% du Poggio !
Philippe Gilbert, Oliver Naesen et d’autres sont pris au piège tandis que le peloton arrive à toute vitesse dans la dernière bosse du jour. Dès le pied, Bora-hansgrohe et Bahrain-Merida impriment un énorme rythme, et Marcus Burghardt roule d’ailleurs si vite qu’il prend quelques longueurs d’avance. Il est rejoint et dépassé par Jempy Drucker (BMC), qui lance lui une réelle offensive. Le Luxembourgeois insiste pendant un moment alors que c’est la Bahrain-Merida qui dicte l’avancée du peloton en chasse. La formation du Golfe ramène finalement la meute à quelques mètres du coureur de la BMC, à la mi-ascension, et c’est alors Krist Neilands (Israel Cycling Academy) qui tente son va-tout. Le champion de Lettonie est immédiatement suivi par Vincenzo Nibali en personne, et après quelques instants dans la roue, observant qu’un léger trou s’est fait, le Sicilien en remet une couche. Dès lors, plus personne ne peut suivre le vainqueur des trois Grands Tours qui s’envole en tête. Nibali creuse quelque peu son avance sur un peloton qui tergiverse et où les autres favoris s’observent et se neutralisent. Alors, au moment d’aborder la descente du Poggio, Nibali compte dix secondes sur un peloton mené par la Bora-hansgrohe.
Mais le paquet est remué par diverses accélérations dans la descente, dont celles de Michal Kwiatkowski et Peter Sagan. En tête, Nibali profite de ses qualités d’équilibriste pour conserver un avantage de dix secondes alors que c’est Matteo Trentin (Mitchelton-Scott) qui parvient finalement à s’extirper du peloton dans les derniers lacets de la descente. De retour sur le plat, à un peu plus de deux bornes du but, Vincenzo Nibali relance de toutes ses forces mais se retrouve en ligne de mire de Matteo Trentin, lui-même juste devant le peloton. Il faut à ce dernier quelques instants pour se réorganiser et permettre à des équipiers de venir travailler. Mais les hectomètres défilent, et si Trentin est repris avant même la flamme rouge, Nibali compte lui toujours une poignée de secondes sur un paquet emmené par la Quick Step. Après deux virages, Nibali se présente dans la dernière ligne droite, à 300 mètres de la ligne, avec une petite marge, mais qui s’avère bien suffisante pour se relever quelques instants avant la ligne d’arrivée pour fêter un succès rêvé devant ses tifosi. Le peloton échoue donc sur les talons du Sicilien, avec un Caleb Ewan (Mitchelton-Scott) qui se montre plus rapide qu’Arnaud Démare (Groupama-FDJ) pour la seconde place.
Palmarès
1 Vincenzo Nibali (Bahrain Merida)
2 Caleb Ewan (Mitchelton-Scott) t.m.t
3 Arnaud Démare (Groupama – FDJ)
4 Alexander Kristoff (UAE-Team Emirates)
5 Jurgen Roelandts (BMC)
6 Peter Sagan (BORA – hansgrohe)
7 Michael Matthews (Sunweb)
8 Magnus Cort Nielsen (Astana)
9 Sonny Colbrelli (Bahrain Merida)
10 Jasper Stuyven (Trek – Segafredo)
Plus d’informations à venir…