Tour de Lombardie : Monumental Thibaut Pinot !
Thibaut Pinot le chérissait depuis tant d’années. Et le Tour de Lombardie le lui a enfin rendu. Ce samedi, le coureur de la Groupama-FDJ est allé chercher sa toute première victoire dans un Monument du cyclisme, et donc apporté une valeur ajoutée conséquente à son palmarès. En grande forme depuis plusieurs semaines, le grimpeur franc-comtois s’est tout simplement montré le plus fort sur les 241 kilomètres du parcours entre Bergame et Come. D’abord sorti avec Vincenzo Nibali (Bahrain-Merida), Primoz Roglic (LottoNL-Jumbo) et Egan Bernal (Team Sky) dans le Mur de Sermano, Thibaut Pinot s’est finalement isolé dans le Civiglio, dernière difficulté du jour, venant à bout d’un Nibali accrocheur. Vainqueur de Milan-Turin il y a quelques jours, Pinot clôture ainsi sa saison sur la plus belle des notes et devient le premier coureur Français a remporté le Tour de Lombardie depuis Laurent Jalabert, en 1997. Le tenant du titre Vincenzo Nibali a réussi à prendre la deuxième place tandis que Dylan Teuns (BMC) a complété le podium au sprint.
Comme attendu, le départ du cinquième et dernier Monument de la saison est particulièrement animé. Les attaques se multiplient dès les premiers kilomètres mais il faut attendre une vingtaine de bornes pour voir un groupe se dégager. Huit coureurs prennent les devants : Davide Ballerini (Androni-Sidermec), Umberto Orsini, Alessandro Tonelli (Bardiani-CSF), Florian Sénéchal (Quick Step Floors), Franck Bonnamour (Fortuneo-Samsic), Jhonatan Restrepo (Katusha-Alpecin), Michael Storer (Sunweb) et Marco Marcato (UAE Team Emirates). Néanmoins, le peloton ne laisse pas immédiatement filer. Pendant quelques minutes, Wilier Triestina-Selle Italia tente en effet d’opérer la jonction car non-représentée en tête. La lutte dure une dizaine de kilomètres et tourne finalement à l’avantage des échappés, qui découragent les coureurs de la formation italienne continentale. Alors, après quarante kilomètres, l’écart atteint la minute, puis les six minutes vingt bornes plus loin. Immédiatement, la Movistar d’Alejandro Valverde et la Groupama-FDJ de Thibaut Pinot prennent les commandes du peloton et n’accordent pas plus d’avance aux échappés. Les deux équipes s’attachent même à ramener l’écart à cinq minutes et à le stabiliser à cette hauteur pendant toute la première partie de course. Ainsi, après le Colle Brianza, à 120 bornes du but, les huit échappés ne jouissent que cinq minutes d’avance. Et cela ne s’arrange pas dans les kilomètres qui suivent. La Groupama-FDJ hausse encore le ton à l’approche des cent derniers kilomètres et de la première section importante de l’épreuve.
À 85 kilomètres du but, les échappés plongent alors sur Onno, qui précède la Madonna del Ghisallo, avec trois minutes d’avance seulement. Dix bornes plus loin, il est alors temps d’arpenter la fameuse ascension de l’épreuve et ses 8,5 km à 6,2% de moyenne. Au pied, le peloton n’est toutefois plus qu’à 2’30, et la Movistar ainsi que la Bahrain-Merida viennent imposer un bon train. À l’avant, l’échappée se réduit de moitié avec Tonelli, Orsini, Bonnamour et Storer comme derniers rescapés.Mais le peloton s’agite, et alors qu’une première sélection s’effectue, Jan Hirt (Astana) et Jack Haig (Mitchelton-Scott) sortent tour à tour. Au sommet de la Madonna del Ghisallo, le quatuor de fuite conserve près de 50 secondes d’avance sur Jack Haig, et un peu plus d’une minute sur le peloton. La descente qui suit est rapidement avalée puis le Colma di Sormano, et son Mur (1,9 km à 15,8%) se présentent. L’écart diminue progressivement entre la tête de course et le peloton, mais il chute drastiquement lorsque la LottoNL-Jumbo vient mettre les bouchées doubles. L’écurie néerlandaise met le peloton en file indienne sur la partie la plus roulante du Sormano, élimine de nombreux coureurs, rattrape les échappés matinaux, puis lance Primoz Roglic à l’approche du mur. De façon assez surprenante, le Slovène démarre dès les premières pentes vertigineuses. Derrière, personne ne répond, mais la Bahrain-Merida vient imprimer le tempo et réduit rapidement le peloton à une vingtaine d’unités. Romain Bardet et David Gaudu, entre autres, sont en difficulté assez vite.
Le Mur de Sormano se monte à l’arrachée et Roglic navigue dix secondes devant le groupe des favoris emmené par Pellizotti, qui laisse bientôt sa place à son leader ! Vincenzo Nibali sort en effet de sa réserve à près de 50 kilomètres de la ligne et n’emmène avec lui que Thibaut Pinot. Le duo reprend très vite Roglic et passe au sommet avec dix secondes d’avance sur le coureur de la LottoNL-Jumbo. Ce dernier est donc contraint de faire l’effort dans la longue descente du Sermano pour faire la jonction. C’est chose faite à 40 bornes du but, tandis qu’Egan Bernal, lui aussi, réalise une belle descente et se rapproche des trois coureurs échappés. Le Colombien fournit un gros effort et cela lui donne raison. Au terme de la descente, et après une ultime relance sur le plat, le prodige de la Sky rentre sur la tête de course. Derrière le quatuor, on retrouve alors un groupe conséquent d’une quinzaine d’hommes, pointé à 45 secondes. S’installe alors une lutte entre les hommes aux avant-postes et les poursuivants, où Daniel Martinez (EF Education First) fait seul le travail pour ses leaders Rigoberto Uran et Michael Woods. Avec les trois hommes de l’écurie américaine, on compte notamment Pozzovivo, Cataldo, Chernetskii, Pellizotti, Izagirre, Reichenbach, Mas, Yates, Uran, Woods, Wellens, Valverde, Majka, Teuns, Tolhoek. Mais c’est bien vers le quatuor que la balance penche.
À 25 kilomètres de la ligne, l’écart est stabilisé en faveur de Pinot, Nibali, Bernal et Roglic, qui se dirigent vers le Civiglio, dernière bosse du jour. Celle-ci est entamée à 17,5 bornes du but, et dès le pied, après une petite accélération de Pinot, Roglic montre ses limites et laisse s’échapper ses trois compagnons de fuite. Derrière, le groupe de poursuite s’agite quelque peu, mais c’est bien devant que la course se joue. Nibali place une attaque, avec son style caractéristique assis sur sa selle, et distance Bernal. Pinot reste lui bien calé dans la roue et passe bien volontiers des relais. Quelques instants plus tard, il teste même Nibali, qui parvient à répondre, une première fois, puis une seconde. Le Sicilien sert les dents mais résiste alors que Majka, Uran, Dan Martin ou encore Izagirre reprennent Egan Bernal, bien distancé par le duo de tête. Un duo … qui devient finalement un solo à 14 bornes du but ! Thibaut Pinot accélère à nouveau et Nibali coince nettement, collé à la route. Le Français ne se fait pas prier et prend immédiatement ses distances, le tout pour basculer au sommet, à treize kilomètres de la ligne, avec vingt secondes d’avance. Dans la descente, qui lui avait été fatale l’an passé, Pinot conserve son avantage, voire le renforce légèrement.
Nibali n’est plus en mesure de faire l’effort, et à huit kilomètres de l’arrivée, le Français compte d’ailleurs 25 secondes d’avance sur l’Italien, et près de 40 sur Dan Martin, Rafal Majka et Tim Wellens. Le Franc-Comtois aborde une portion de plat avant d’aller chercher l’ultime petite bosse du jour. Dans celle-ci, il augmente encore son avance sur Nibali, qui plafonne franchement et qui voit d’ailleurs les poursuivants se rapprocher de lui. Pour sa part, en serrant les dents, Pinot franchit le sommet et bascule vers la ligne d’arrivée à Comme. Nibali est avalé à l’approche du sommet par Martin, Uran, Teuns, Majka et Izagirre… mais il repart dans la foulée, et n’est pas pris en chasse. Toutefois, le tenant du titre doit bel et bien laisser sa couronne à Thibaut Pinot, qui s’en va aborder le dernier kilomètre avec un grand sourire. Le Français se dirige vers son premier Monument et peut savourer dans la dernière ligne droite, y compris avec ses coéquipiers sur le bord de la route. Quelques jours après sa victoire sur Milan-Turin, Pinot remporte donc le Tour de Lombardie, 21 ans après Laurent Jalabert, dernier Français au palmarès. Nibali vient prendre la deuxième place malgré la souffrance des derniers kilomètres tandis que Dylan Teuns prend la troisième place au sprint.
Classement
1 Thibaut Pinot (Groupama – FDJ)
2 Vincenzo Nibali (Bahrain Merida) à 0’32
3 Dylan Teuns (BMC) à 0’43
4 Rigoberto Urán (EF Education First-Drapac p/b Cannondale) m.t
5 Tim Wellens (Lotto Soudal) m.t
6 Ion Izagirre (Bahrain Merida) m.t
7 Rafał Majka (BORA – hansgrohe) m.t
8 Domenico Pozzovivo (Bahrain Merida) m.t
9 Dan Martin (UAE-Team Emirates) à 0’48
10 George Bennett (LottoNL-Jumbo) à 1’22