Julien Bérard : « Si je n’ai rien chez les pros, j’arrête »
Julien Bérard est « prêt ». Si le passage à l’année 2018 devait sonner le glas de sa carrière de coureur cycliste professionnel, le Français de 30 ans l’accepterait sans amertume. Il faut dire que l’hypothèse a pris du poids ces derniers jours. Non-reconduit par AG2R-La Mondiale, décision dont il a été informé « dans le courant de l’été », Bérard comptait bien poursuivre l’aventure dans l’élite, et progressivement, l’équipe cycliste de l’Armée de Terre s’est révélée être la « piste la plus sérieuse ». Comme d’autres, il envisageait ainsi la saison prochaine sous les couleurs camouflages des soldats de David Lima Da Costa. Mais comme les autres, il a pris connaissance de l’arrêt de la structure sur décision du Ministère. Aujourd’hui, l’ancien Vélo d’or Espoirs (2009) est orphelin de contrat pour l’année à venir.
« Je n’ai pas d’équipe pour 2018, a-t-il révélé à Cyclingpro.net ce jeudi midi. Je devais aller à l’Armée. Il n’y avait rien d’officiel dans le sens où ils ne pouvaient rien dire, mais je comptais aller là-bas. J’avais vraiment misé là-dessus, donc quand on comprend la nouvelle au 15 novembre, c’est compliqué ». Julien Bérard n’a pas encore tiré un trait définitif sur sa carrière, mais il se veut aussi réaliste à une époque de l’année où les effectifs sont bouclés et où les rassemblements de pré-saison s’enchaînent. « Si demain on m’appelle, qu’on me propose un contrat, bien sûr que j’y vais. Je continue à m’entraîner, car j’aime ça, nous a-t-il indiqué. Mais j’ai un peu fait un croix sur le vélo. À moins d’un miracle… Dans ma tête, je suis prêt pour la retraite. Je l’étais déjà ». Car une chose est bien claire pour le natif de Paris : « Si je n’ai rien chez les pros, j’arrête. »
Pur produit de la structure AG2R-La Mondiale, chez qui il a passé l’ensemble de ses huit années professionnelles (2010-2017), en plus de ses quatre saisons de formation au club de Chambéry (2006-2009), Julien Bérard se veut philosophe et sans regret aucun au moment où le rideau semble tomber sur sa carrière. « Il y a toujours une déception, confesse-t-il. On en veut toujours plus. Quand, dans le business, un gars atteint un million d’euros de chiffre d’affaires, il en veut trois ! Mais il peut aussi se dire que sa société aurait pu s’arrêter quand il ne faisait ‘que’ 500 00 euros. Il faut se contenter de ce qu’on a, de ce qu’on a eu. Pour ma part, j’ai fait huit ans chez les pros, chez AG2R-La Mondiale, dans le WorldTour, dans une des plus belles équipes françaises, parmi les plus grandes équipes du monde. Il n’y a pas à rougir de ça ».
Julien Bérard fut aux premières loges pour voir l’équipe savoyarde évoluer, et atteindre les sommets sur les plus grandes épreuves du calendrier. Il aurait, à titre personnel, pu espérer davantage encore de sa carrière. Mais c’est une nouvelle fois le positif qu’il a souhaité faire émerger. « J’aurais pu ne jamais passer pro, a-t-il rappelé, bien que sa dernière saison espoir, avec des succès d’étape sur le Tour de l’Avenir et la Ronde de l’Isard, ne laissait que peu d’autres options. J’aurais pu faire deux ans, quatre ans, six ans… ou bien seize ans, oui, mais on ne peut pas tous être des champions, tous gagner des courses, tous faire une carrière. Il y a un peu de tout. J’étais dans la moyenne supérieure de ce qui peut se faire. Je pense avoir fait de belles années, je n’ai pas à regretter quoique ce soit. Je n’ai juste pas fait le Tour de France et pas gagné de courses, ce sont mes seuls regrets sportifs. Au-delà de ça, j’ai vécu tous les moments à fond et si je venais à quitter le monde pro, je le ferais bien dans mon corps, et dans ma tête ».
Son unique podium dans l’élite restera celui acquis en 2011 sur le Tour du Doubs. Mais c’est sa quatrième place au championnat de France, la même année, qu’il cite aujourd’hui comme sa « meilleure performance ». Le jeune trentenaire gardera aussi un excellent souvenir de son premier Grand Tour, le Giro 2011, terminé, qui plus est aux côtés d’un John Gadret étincelant et quatrième (puis troisième après déclassement d’Alberto Contador) du classement général final. « Ce n’est que des bons souvenirs, a-t-il insisté. C’est une passion. J’ai consacré quinze ans de ma vie à faire du haut-niveau. Je ne retiendrai que du bon. J’ai vécu une super aventure, c’était une école de la vie, des rencontres. J’ai voyagé, j’ai pu vivre d’une passion, ce qui est quand même assez rare. J’ai toujours été un sportif compétiteur. Il n’y a eu que du bénéfique ».
Fidèle à la manière qu’il a eu d’appréhender sa carrière, « sans se projeter dans des trucs incroyables », « année par année », « avec un certain détachement », Julien Bérard admet « tomber de moins haut » à l’heure actuelle car « toujours conscient que cela arriverait un jour ou l’autre ». S’il garde un mince espoir de rebondir, il est tout aussi enclin à tourner la page. Et à s’engager dans « un projet dans le milieu du vélo » sur lequel il ne peut encore se prononcer complètement.
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