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[ITW] Adrien Petit : « Prouver que ce n’était pas un coup de chance »

Depuis des mois, depuis un an, même, Adrien Petit n’attend que ça. Quand beaucoup redoutent l’Enfer du Nord, le coureur de Direct Energie le chérit, à l’instar de tout ceux qui sont parvenus à l’apprivoiser au gré des tentatives. Dans cette démarche, justement, l’ancien vice-champion du monde Espoirs a passé un cap en 2016, signant une dixième place sur le Vélodrome de Roubaix, paré pour l’occasion du costume de meilleur Français. Cette performance, réalisée sur ses terres, devant les siens, a sans nul doute constitué un tournant dans la carrière de « Bison », désormais pleinement conscient de ses capacités. Le Nordiste de 26 ans, ancien vainqueur du Tro Bro Leon, a trouvé sa place dans la Reine des Classiques. Le but est désormais de la consolider. En marge de ce Paris-Roubaix 2017, Adrien Petit s’est confié auprès de Cyclingpro.net sur l’histoire qu’il entretient avec l’épreuve, la place qu’elle occupe, ce qu’elle représente mais aussi ce dont il espère en tirer cette saison.

Adrien, vous avez reconnu les pavés de Paris-Roubaix vendredi. Comment cela s’est-il passé ?

Très bien ! Les pavés sont très secs, comme on pouvait s’y attendre. Ce sont des conditions idéales pour moi. Je préfère ça à un Paris-Roubaix mouillé. C’est donc déjà un bon point. Puis les sensations sont bonnes, aussi bonnes que l’an passé. Ne reste plus qu’à voir comment ça se goupillera en course.

Pendant ces reconnaissances, quel est le véritable objectif ?

En fait, ça dépend un peu des années. Cette saison, étant donné que nous n’avons pas fait le Grand Prix de l’Escaut, ça nous a permis de nous « débloquer » un peu, de faire des efforts. Pas trop, mais quelques uns, « en rappel ». Habituellement, après le Grand Prix d’Escaut, la reconnaissance nous permet surtout de repérer, de façon plus cool et s’imprégner du parcours. Personnellement, de toute façon, je connais le tracé par coeur. Il ne change quasiment pas comparé aux années précédentes. Il y a juste des modifications en début de course.

Y a-t-il une part de prudence, tout de même, lors de ces reconnaissances ?

Forcément, même si on fait de bons déblocages, on ne se met pas non plus en allure course, on ne prend pas les virages à bloc etc… Mais à vrai dire, le risque n’est que peu présent lors des recos, quand on est seul sur le pavé. Le danger, c’est en course quand tout le monde est groupé sur les secteurs.

Excepté ce traditionnel repérage, allez-vous vous-même souvent inspecté les pavés ?

Je suis quand même assez loin du parcours puisque vivant à Arras. Il faut tout de même faire un peu plus de soixante kilomètres pour trouver les secteurs les plus proches de la maison, qui sont Mons-en-Pévèle et Orchies. D’ailleurs, ce sont des coins où je ne vais pas trop rouler car je dois traverser des routes où l’accès n’est pas forcément adéquat. J’y vais deux ou trois fois dans l’hiver quand il fait beau et que je vais rouler de ce côté-là. Sinon, je ne vais pas sur les pavés à d’autres moments de l’année que lors de la semaine précédent Paris-Roubaix.

Sans négliger les courses précédentes, peut-on dire que tout ce que vous faites, c’est en fonction de Paris-Roubaix ?

Ce serait quand même compliqué de tout miser sur « Roubaix ». Ca reste une course où la part de risque existe. De fait, je prends au sérieux toute la période de Classiques. C’est une phase importante de la saison, ce sont des courses que j’affectionne et pour lesquelles je suis motivé à bloc. Après, il est vrai que le matin de Paris-Roubaix, je le suis encore davantage.

Au cœur de la préparation hivernale, vous songez davantage à toute la campagne Flandrienne ou à cette course en particulier?

Je dirais que j’ai quand même un regard sur la globalité, mais il est certain que j’ai plus souvent une pensée pour Roubaix que pour les autres Classiques, forcément.

Etant originaire de la région, veniez-vous souvent sur le bord des routes, petit, pour assister à Paris-Roubaix ?

Oui, évidemment. Je l’ai vécu dans plusieurs situations. Je l’ai vécu sur des secteurs. J’ai des souvenirs à la sortie d’Arenberg, par exemple. Je l’ai vécu au vélodrome. Je l’ai aussi vécu à la télé, pour en voir un peu plus. J’ai expérimenté un peu toutes les situations. Mais le vivre désormais de l’intérieur, c’est autre chose. C’était un rêve de gosse, c’est clair.

Vous êtes-vous toujours prédestiné à devenir un spécialiste de cette course ?

Les première fois où je m’y suis rendu, je n’y pensais pas encore vraiment. Je ne sais même pas si je faisais du vélo… Je viens d’une famille imprégnée par ce sport mais je m’y suis mis relativement tard. Donc j’y allais au début sans forcément me dire que ce serait moi plus tard. Ensuite, au fur et à mesure des années, c’est sûr que j’ai commencé à avoir une petite idée en tête, me disant que c’était une course qui me faisait rêver et que j’adorerais faire. Maintenant, me voilà à quelques heures de mon septième Paris-Roubaix.

On définit cette course comme la souffrance à l’état pur. Pourtant vous aimez ça. Cela se rapproche du masochisme…

Je ne peux pas dire ça (rires). D’ailleurs, on pourrait ranger toutes les Classiques dans cette case-là. C’est vrai qu’il faut avoir une force mentale différente que sur d’autres courses mais me concernant, compte tenu de mes qualités, c’est moins dur d’aller faire Paris-Roubaix qu’une étape avec cinq cols, par exemple (rires). On pourrait parler de masochisme si un grimpeur venait faire Paris-Roubaix, peut-être. Pour moi, pas forcément.

Vous arrive-t-il de profiter de Paris-Roubaix ?

Pendant la course, le seul moment où on savoure, c’est quand on rentre dans le vélodrome. Enfin, ça dépend… Si tu rentres dans le vélodrome et que tu joues une place importante, tu ne savoures pas encore, mais tu le fais une fois la lignée passée et là tu te dis « je l’ai fait ». À ce moment-là seulement tu sors de la bulle dans laquelle tu es continuellement enfermé pendant la course. Il y a une concentration intense qui ne permet effectivement pas de profiter pendant. On se rend pas trop compte du truc durant la course, tellement on est concentré sur soi, sur ses adversaires, ses trajectoires. Par contre, le soir venu, tu te refais le scénario de la course et tu te dis « putain, c’est vraiment celle-ci que j’aime ».

En combien de temps se remet-on d’un Paris-Roubaix ?

Cette année, ce sera différent pour moi car je couperai juste derrière. Paris-Roubaix est la dernière course du premier cycle de ma saison. Mais en gros, il y a trois jours assez compliqués avec des courbatures, puis ça s’estompe et ça passe rapidement.

Venons en à la course de dimanche. Quel est votre état d’esprit à quelques heures du départ ? Qu’est-ce qui prend le dessus ?

C’est davantage l’impatience, l’envie de bien faire. J’ai vraiment hâte d’y être. Je n’ai pas trop d’appréhension avant le départ. J’en aurais eu davantage si ça avait été un Paris-Roubaix sous la flotte. Je pars serein, concentré, motivé et, comme je l’ai dit, avec l’envie de bien faire.

Comment évaluez-vous votre niveau de forme avant cette grande échéance ?

Il est très bon. Si je prends comme point de repère le Tour des Flandres, j’avais de meilleures sensations la semaine dernière que l’an passé. J’ai eu un peu de malchance à un moment important de la course mais je sais que les jambes sont bonnes. C’est l’essentiel. En une semaine de temps, la condition reste la même, du moins je le suppose. Donc oui, je pense aborder Paris-Roubaix dans la même optique et la même condition que l’an passé.

Vous aviez très bien lancé votre campagne avec une dixième place à sur l’Omloop Het Nieuwsblad. Êtes-vous un peu plus déçu de vos dernières sorties ?

La seule course pour laquelle je peux vraiment être déçu, c’est À travers les Flandres. J’ai un peu manqué de vigilance et je ne m’attendais pas à ce que la course se joue à ce moment-là. Sur le Grand Prix E3 Harelbeke, j’ai chuté et je ne peux que m’en prendre à moi-même. J’ai fait une erreur à un moment important de la course et tout est donc passé à la trappe à cause de cet incident. Lors des Trois Jours de La Panne, je me sentais déjà très bien. J’ai pu jouer, me faire plaisir, tout en aidant Sylvain (Chavanel). Ensuite, au Tour des Flandres, j’étais très bien placé avec Sylvain et Bryan (Coquard) avant le Mur de Grammont mais il y a eu une chute d’un coureur sur la gauche qui m’a perturbé et j’ai déraillé. Sans ce fait de course, je reste convaincu que je suis dans le bon groupe à la sortie du Muur. Cela aurait bien changé la donne, mais ce sont des circonstances de course qui font justement la beauté de ces épreuves. C’est sûr, on n’espère jamais que la malchance tombe sur nous, mais ça arrive. Maintenant, avec ce manque de réussite sur les deux dernières courses, j’espère que j’ai eu mon quota et que ce sera différent ce week-end.

Dès la fin du Tour des Flandres, à notre micro, vous vous projetiez sur Paris-Roubaix. Etait-ce même le cas pendant la course, quand vous avez réalisé que le bon coup était parti ?

C’est vrai qu’une fois que la course est jouée, c’est assez différent. Si on a les jambes, on monte quand même les bosses assez vite, mais l’approche est moins nerveuse, on frotte beaucoup moins, ce n’est pas du tout pareil. En l’occurrence, j’étais dans un groupe d’une vingtaine de mecs dimanche, et c’était relativement cool. Mais ça reste le Tour des Flandres, et comme on peut le voir sur les images, ça sprinte même pour une place de 20e, 25e, 30e. Ce sont des courses tellement mythiques… On ne voit pas ça ailleurs. Il faut donc quand même rester concentré jusqu’au bout.

En 2016, vous terminez dixième de Paris-Roubaix. Que vous en reste-t-il un an plus tard ? Des regrets, de la fierté ?

Si on m’avait dit au départ que je finirais dixième, j’aurais signé immédiatement. Après, quand j’y repense, quand je me refais la course, il y a forcément une part de déception. J’ai quand même fait beaucoup d’efforts à contre-temps pour revenir sur l’avant, d’abord car j’avais été pris dans la première chute, lors de laquelle Ventoso s’était fait couper par un disque. J’étais ensuite dans un groupe en chasse avec Sagan et Cancellarra, qui sont repartis à Orchies, au chemin des Prières, où je n’étais pas bien placé. Je suis seulement rentré sur ce groupe dans le secteur de Mons-en-Pévèle. Pour résumer, j’ai vraiment fait beaucoup d’efforts à contre-temps qui m’ont coûté. Sur le fond, ça n’a pas changé grand chose car on n’est pas rentré sur l’avant, mais il faut que j’ai ça en tête cette année afin d’éviter tous ces efforts superflus.

Avez-vous l’impression d’avoir un statut à assumer du fait d’avoir été premier Français en 2016 ?

Je suis conscient que beaucoup de monde attend quelque chose de moi, mais ce n’est pas une pression, c’est une source de motivation. J’ai envie de confirmer et de montrer que ma place de l’an passé, ce n’était pas un coup de chance, que je suis allé la chercher à la pédale. Cette année, je vais essayer de prouver, même si les circonstances de course auront leur mot à dire. J’ai en tous les cas envie de jouer un rôle important.

Pensez-vous avoir franchi un palier supplémentaire ces douze derniers mois ?

Absolument. Je sens que je progresse tous les ans, que je passe un petit cap à chaque fois. C’est intéressant, et sur des courses comme celles-ci, ça se voit davantage que sur des courses plus courtes. Passé les 200 kilomètres, certains commencent à plier les ailes, et c’est là que je me rends compte que je progresse au fil des saisons.

Vous êtes-vous fixé un objectif chiffré en abordant ce Paris-Roubaix ?

C’est simple. Tous les ans, j’essaie de faire mieux que l’année précédente. Lors des mes premières années chez Cofidis, j’étais autour du top-20, l’an passé j’étais dixième, donc j’espère que ce sera mieux que dixième cette année. Je ne peux pas décréter une place précise. Je peux tout aussi bien arriver pour la huitième place et faire huitième qu’arriver pour la troisième place et faire cinquième ou sixième. Je n’en sais rien. Ce que je veux, c’est jouer un rôle important et être avec les meilleurs à la sortie du Carrefour de l’Arbre. Je sais qu’une fois sorti de ce secteur, un bon bout du travail sera fait et il y aura moins de risque de plier ensuite.

Dans le cas d’une course limpide et sans accroc, quelle est, selon vous, la place que vous pourriez occuper ?

Dans une course fluide, compte tenu du plateau, je peux être dans le top 10. Je ne me mettrais pas cinquième, plutôt huitième ou neuvième.

Sans parler de peur, qu’appréhendez-vous le plus au matin de Paris-Roubaix ?

La malchance, évidemment. Ce n’est pas une peur de chuter, c’est davantage une peur de louper sa course à cause d’un ennui. Je n’appréhende pas la chute en soi, mais la chute m’ennuierait fortement dans la mesure où ça anéantirait ma course. C’est la même chose pour la crevaison. C’est la raison pour laquelle il faut être très concentré sur ce qu’on fait, où on met les roues.

Vous aviez quinze ans lors du premier sacré de Tom Boonen, qui tire sa révérence ce dimanche. A-t-il été un exemple pour vous ?

C’est lui qui m’a donné envie de commencer le vélo, clairement. J’ai débuté en cadet 2e cannée, soit autour de 15-16 ans. Il était plus ou moins mon idole, c’était un coureur que j’adorais. C’est un grand champion dont le nom restera gravé dans l’histoire du vélo.

Imaginons que vous arrivez avec Boonen pour la victoire dimanche…

Ben… ça se jouerait à la pédale (sourires) ! C’est comme ça. De toute façon, je sais déjà très bien le schéma que je mettrais en place si cette situation se présentait. Je sais comment aborder le Vélodrome, j’ai déjà mon petit plan en tête et je sais quoi faire à quel moment.

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