Critérium du Dauphiné : Wout Poels redonne le sourire à Ineos, Jakob Fuglsang en jaune
L’étape reine du Critérium du Dauphiné ne l’a pas été seulement par son parcours. C’est aussi la météo, à quelques reprises dantesque, qui a franchement durci la tâche des coureurs ce samedi entre Saint-Genix-les-Villages et le sommet de l’inédite Montée de Pipay. Au terme des 133 kilomètres du parcours et des dix-neuf de l’ascension finale, c’est Wout Poels (Team Ineos) qui a levé les bras et ainsi redonné du baume au coeur à une formation Ineos dont le leader naturel Chris Froome s’est gravement blessé plus tôt cette semaine. Le Néerlandais a réglé un sprint à trois devant Jakob Fuglsang (Astana) et Emanuel Buchmann (Bora-hansgrohe) qu’il n’a pourtant rejoints qu’à 400 mètres de la ligne. Impressionnant de force dans les cinq derniers kilomètres, le Danois de la formation Astana se pare lui du maillot jaune à la veille de l’étape finale aux dépens d’un Adam Yates (Mitchelton-Scott) pas aussi aérien ce samedi. Le Britannique est repoussé à 8 secondes tandis que Tejay Van Garderen (EF Education First) occupe la troisième place du général à 20 secondes.
Ce samedi après-midi, sous les coups de 13 heures, la bagarre est féroce au départ de la septième étape du Critérium du Dauphiné. Les attaques fusent pendant plus de vingt kilomètres avant qu’un groupe de vingt-deux coureurs ne parviennent à créer la bonne brèche. On retrouve là Michael Woods (EF Education First), Edward Theuns, Niklas Eg (Trek-Segafredo), Philippe Gilbert, Julian Alaphilippe (Deceuninck-Quick Step), Kevin Ledanois (Arkéa-Samsic), Gianni Moscon, Dylan Van Baarle (Team Ineos), Robert Power (Sunweb), Ruben Fernandez (Movistar), Mikaël Cherel (AG2R-La Mondiale), Joey Rosskopf (CCC), Magnus Cort, Alexey Lutsenko (Astana), Jesper Hansen (Cofidis), Mark Padun (Bahrain-Merida), Lennard Hofstede (Jumbo-Visma), Damien Howson, Jack Haig (Mitchelton-Scott), Rémy Mertz (Lotto-Soudal), Felix Grossschartner (Bora-hansgrohe) et Quentin Pacher (Vital Concept-B&B Hotels). En une poignée de kilomètres, le peloton concède deux minutes et la Mitchelton-Scott se voit dans l’obligation de contrôler cette échappée fleuve comprenant les dangereux Alexey Lutsenko et Michael Woods. Elle ne peut toutefois empêcher la formation de contres. En ordre dispersé, ce sont en effet Stéphane Rossetto (Cofidis), Pierre Rolland (Vital Concept-B&B Hotels), Jérémy Maison (Arkéa-Samsic), Benoit Cosnefroy (AG2R-La Mondiale), Julien Bernard (Trek-Segafredo), Edward Ravasi (UAE Team Emirates) et Nils Politt (Katusha-Alpecin) qui partent à contre-temps.
Il leur faut donc une longue poursuite, l’ascension et la descente, du premier col du jour, celui de l’Epine, pour finalement recoller à l’échappée. Néanmoins, au moment de leur jonction, à environ 80 kilomètres de l’arrivée, Julian Alaphilippe et Lennard Hofstede se sont eux détachés. Le duo collabore immédiatement et fait de suite la différence sur les désormais 27 poursuivants. Au pied du Col du Granier, deuxième des quatre difficultés du jour, leur avance est déjà de plus d’une minute sur le contre, et atteint même quasiment les quatre minutes sur un peloton toujours mené par Mitchelton-Scott, mais pas de manière frénétique. Dans cette deuxième ascension du jour, les écarts se stabilisent quelque peu et Alaphilippe peut donc franchir sereinement le sommet en tête, comme lors du col précédent, et consolide encore un peu plus son maillot à pois. Dans la descente qui suit, le Français se retrouve même un moment seul en tête après la chute de son compère de fuite Lennard Hofstede, coupable d’un mauvais virage. Par ailleurs, Jérémy Maison et Gianni Moscon s’activent derrière et partent ensemble à la chasse des hommes de tête. Car malgré sa chute, Hofstede se relève rapidement et parvient à retrouver la roue d’Alaphilippe à l’entame des cinquante derniers kilomètres. Derrière eux, la chasse se recompose et les deux intercalés sont repris, mais le peloton passe également à la vitesse supérieure et l’écart dégringole.
En l’espace de quelques kilomètres, les deux hommes voient leur avantage fondre, et ce bien que le soleil ne s’éclipse derrière les nuages et l’orage attendus. Avant même le pied du Col de Marcieu, avant-dernier difficulté du jour, Alaphilippe se relève et laisse Hofstede seul en tête. Le Néerlandais n’est toutefois repris que quelques instants plus tard et la sélection débute, autant dans l’échappée que dans le peloton. À la difficulté de la pente s’ajoute celle du déluge qui s’abat sur la route. En tête, Magnus Cort s’attache à mener l’échappée pour Lutsenko tandis que Mitchelton-Scott ramène l’écart à 1’30 à 35 bornes de la ligne. Sentant la menace, Lutsenko et Woods relancent dans l’échappée sous la grêle et les trombes d’eau. Le duo passe au sommet roue dans roue mais le Kazakh se retrouve seul peu après suite à une crevaison du Canadien. Le peloton bascule lui avec deux minutes de retard. Dans la descente, Woods récupère un groupe de poursuivants avec Hansen, Chérel et Moscon, et ce quatuor parvient à opérer la jonction avec Lutsenko avant les vingt derniers kilomètres. Deux bornes plus loin, la Montée de Pipay, longue mais régulière (7,1%) débute. Grossschartner, Power et Cort parviennent à faire leur retour en tête et c’est le Danois qui prend à nouveau les rênes pour son coéquipier. Dans le peloton, la Movistar se met à la place dès le pied et réduit l’écart à une minute à 15 kilomètres du but. La météo redevient plus clémente quelques instants et les coéquipiers de Nairo Quintana poursuivent leur travail de sape.
Après un ultime relais d’Eduardo Sepulveda, le Colombien passe à l’attaque à environ onze bornes de la ligne. Personne ne prend son sillage si ce n’est Michal Kwiatkowski (Team Ineos). L’écart se réduit immédiatement à 30 secondes avec la tête de la course, où Woods et Lutsenko accélère à nouveau l’allure. Quintana insiste intercalé, mais les formations Astana et Mitchelton-Scott réagissent. Une grosse relance de Gorka Izagirre avec Jakob Fuglsang dans la roue permet d’ailleurs de boucher le trou avec Quintana, qui retrouve sa place dans le groupe des favoris après trois bornes à l’offensive. Michal Kwiatkowski, en revanche, maintient son effort et s’en va chercher le duo de tête. Dans le peloton, une vingtaine d’homme s’accroche encore, et à peine 10 secondes séparent le désormais trio et le groupe maillot jaune grâce au rythme dicté par Jack Haig (Mitchelton-Scott), coéquipier du maillot jaune Adam Yates. L’Australien continue son beau travail jusqu’à parvenir à faire la jonction avec Kwiatkowski, Lutsenko et Woods, ceci à 4 bornes tout juste de la ligne. Immédiatement, Jakob Fuglsang (Astana) lance une lourde offensive. Nairo Quintana (Movistar) ainsi que Thibaut Pinot (Groupama-FDJ) se lancent dans sa roue. Et si le Danois parvient à dégrossir le groupe des leaders et faire mal à tout le monde, il voit tout de même une dizaine d’hommes s’accrocher à sa roue. Les premiers contres surgissent alors, avec Pinot d’abord, puis avec Romain Bardet (AG2R-La Mondiale) et Wout Poels (Team Ineos).
Aucun ne fait toutefois la différence et à moins de 3000 mètres de la ligne, c’est Emanuel Buchmann qui prend l’initiative et qui jouit de l’attentisme de ses rivaux. L’Allemand a le temps de prendre quelques dizaines de mètres avant qu’une réaction ne soit observée. C’est alors Jakob Fuglsang qui fournit un gros effort pour recoller. Derrière, le trou est fait. Dan Martin, Romain Bardet, Wout Poels, Tejay Van Garderen, Thibaut Pinot et le leader Adam Yates sont piégés. Le maillot jaune tente de prendre ses responsabilités mais ne parvient pas à boucher l’écart avec le duo de tête, où seul Fuglsang est à la manoeuvre. Voyant l’écart se maintenir, Pinot tente de relancer en contre, tout comme Dan Martin, mais Fuglsang garde la cadence et passe sous la flamme rouge avec Buchmann dans sa roue et 12 secondes à son avantage. En poursuite, Wout Poels se lance dans un ultime effort pour tenter de recoller. Le Néerlandais se rapproche alors que le reste du groupe reste englué dans la roue d’Adam Yates. Mètre par mètre, Poels grignote et parvient à revenir sur le duo Fuglsang-Buchmann à 300 mètres de la ligne. À peine le temps de reprendre son souffle que le coureur d’Ineos lance le sprint, et l’emporte finalement devant Fuglsang et Buchmann, offrant ainsi une belle victoire à son équipe meurtrie par la blessure de Chris Froome ces derniers jours. Fuglsang profite de sa seconde place et de l’arrivée d’Adam Yates neuf secondes derrière lui pour endosser le maillot jaune à la veille de l’ultime étape. Thibaut Pinot prend la quatrième place du jour, Romain Bardet la septième.
Classement de la septième étape
1 Wout Poels (Team INEOS)
2 Jakob Fuglsang (Astana) m.t
3 Emanuel Buchmann (BORA – hansgrohe)
4 Thibaut Pinot (Groupama – FDJ) à 0’10
5 Dan Martin (UAE-Team Emirates) m.t
6 Adam Yates (Mitchelton-Scott) m.t
7 Romain Bardet (AG2R La Mondiale) à 0’13
8 Tejay van Garderen (EF Education First) à 0’16
9 Dylan Teuns (Bahrain Merida) à 0’30
10 Bjorg Lambrecht (Lotto Soudal) à 0’34
Général après la septième étape
1 Jakob Fuglsang (Astana)
2 Adam Yates (Mitchelton-Scott) à 0’08
3 Tejay van Garderen (EF Education First) à 0’20
4 Emanuel Buchmann (BORA – hansgrohe) à 0’21
5 Wout Poels (Team INEOS) à 0’28
6 Dylan Teuns (Bahrain Merida) à 0’32
7 Thibaut Pinot (Groupama – FDJ) à 0’33
8 Alexey Lutsenko (Astana) à 1’12
9 Steven Kruijswijk (Jumbo-Visma) à 1’20
10 Dan Martin (UAE-Team Emirates) à 1’21