[Entretien] Sébastien Minard : « On ne va pas croire au Père Noël pendant 10 ans »
Crédits photo : (c) Sirotti
Ce week-end, Sébastien Minard écumera les sous-bois d’un cyclo-cross, celui organisé en l’honneur de son meilleur ami (ndlr : Arnaud Coyot, décédé en 2013). L’occasion de se changer les idées, de s’aérer l’esprit et surtout de passer un bon moment dans une période un peu plus compliquée à vivre. Le Picard concède bien volontiers que le cross est à l’heure actuelle ce qui le « maintient à flots », ce qui l’empêche de tomber dans une angoisse trop oppressante. Car depuis de nombreuses semaines désormais, le coureur d’AG2R-La Mondiale a parfaitement conscience qu’il ne sera plus couvert des couleurs terre-et-ciel en 2017. Du haut de ses 34 ans, il n’envisageait pourtant pas encore la retraite. Et ne veut pas s’y résoudre à moins d’avoir tout tenté. Aujourd’hui encore, Sébastien Minard espère.
« Je n’ai toujours pas de contrat pour 2017, a-t-il indiqué mardi soir à VeloPro.fr. Je suis encore en discussion pour l’année prochaine avec certaines équipes. J’ai encore envie de courir. Pour le moment, c’est très chaud et les places sont chères. C’est une année difficile pour se recaser. Chez AG2R-La Mondiale, on est 10 à quitter l’équipe. Et on n’est pas beaucoup à avoir retrouvé. De mon côté, j’espère encore, et ce même si les équipes commencent à partir en stage et qu’elles sont, pour la plupart, au complet ». Si le natif de Senlis était amené à retrouver le peloton en janvier, ce ne serait pas sous un blason français. Ses pistes encore actives le mènent à l’étranger, dans des formations de deuxième division, soit la Continentale Professionnelle. « En France, tout est un peu bouché, avance l’ancien sociétaire de la Cofidis. Je ne sous-estime pas du tout le niveau continental, mais je n’ai pas envie de rouler juste pour avoir un maillot sur le dos. Je veux avoir un objectif ».
L’ancien lauréat de Paris-Camembert se voyait continuer encore deux saisons supplémentaires. « Malheureusement, si ça doit s’arrêter, il faudra l’accepter et prendre un autre chemin, conçoit notre interlocuteur. Pour le moment, c’est un point d’interrogation ». Voire des points de suspension, à qui il ne manque qu’une suite. C’est pourquoi, se voulant optimiste, Minard essaie de garder une forme grâce au cyclo-cross : « La dernière fois, il m’est arrivé d’aller faire un cross sur un coup de tête, en me disant que c’était peut-être mes derniers mois en tant que pros, et qu’il fallait aussi profiter, me faire plaisir. Je suis un peu partagé entre le fait de garder mon niveau et espérer d’ici fin décembre, mais aussi de profiter de mes derniers moments. Fin décembre, peut-être que j’aurai des nouvelles qui me diront de perdurer jusqu’à mi-janvier. Mais on ne va pas non plus croire au Père Noël pendant dix ans. Malheureusement, il faut être réaliste. Les chances restent minimes ».
S’il tente désormais de passer à autre chose, l’équipier modèle qu’est Sebastien Minard nourrit de profonds regrets quant à l’issue de sa collaboration avec AG2R-La Mondiale. Dixième du Tro Bro Leon et vingt-quatrième de l’Omloop Het Nieuwsblad, il pense surtout avoir fait le travail en tant qu’équipier. D’où son amertume à l’heure de raconter son départ de la structure savoyarde. « Ce n’est pas simple de s’arrêter après 12 ans chez les pros, assure celui qu’on surnomme « Mimine ». Quand on l’a décidé, c’est bien, quand on n’a pas en tête de s’arrêter, c’est plus compliqué. Je trouve qu’AG2R-La Mondiale n’a pas été très reconnaissante de ce que j’ai fait. La franchise n’est pas souvent de mise dans ces moments-là. J’ai eu un appel, on m’a dit que je n’étais pas conservé, sans me donner vraiment de raisons. Pourtant j’ai fait une saison correcte et j’ai répondu présent aux rendez-vous qu’on m’a donné. J’ai respecté mon rôle d’équipier comme je l’ai toujours fait en ayant un bon niveau de forme sur les objectifs de l’équipe. Je pensais que la reconnaissance était quelque chose de clé dans l’équipe… »
Quatrième de son tour régional en 2013, ce coureur passe-partout sait par ailleurs se vendre. « Je pense avoir la qualité d’être tout le temps présent pour le début de saison, de pouvoir faire n’importe quel type de course, avance encore Minard. Je me dis que si une équipe me libère une place, j’aurais fait l’hiver. Je me prépare comme si j’allais courir en janvier. Et si ça s’arrête, ça m’aura tout de même plu d’avoir fait un hiver comme celui-là ». Si malheureusement, cela devait s’arrêter, la situation est bien plus floue pour le cycliste de 34 ans. « Il y a un peu d’angoisse concernant l’avenir. Je vais peut-être laisser une grande partie ma vie professionnelle et d’homme derrière moi. La reconversion est un peu compliquée à opérer quand on a fait dix ans chez les pros et que l’on n’a pas travaillé, conclut-il. Il faut trouver un projet, le mener à bien. Et même si on a pas mal de choses en tête, ce n’est pas évident à trouver, ça ne se fait pas comme ça. La situation est un peu difficile à vivre ». Pas question toutefois de sombrer dans la morosité. Sébastien Minard « ose encore y croire » et s’en ira arborer un large sourire ce week-end dans les labourés qui ont un temps fait sa renommée.